Bons baisers du Rhin Supérieur

Fin juillet, le dimanche soir, alors que la 88e Fête du Vin et de la Gastronomie de Ribeauvillé entrait dans sa dernière soirée, un mystérieux visiteur s’annonça au portique d’entrée. Le pas décidé, sacoche à la main, il savait où il allait. Apparemment il avait l’air content de retrouver certains vignerons qui, vaillamment, accueillaient encore le public en salle de dégustation en cette fin d’après-midi… En l’espace d’un instant, alors que la fête commençait à s’assoupir, ce fut le branle-bas de combat ! Qui était ce visiteur mystérieux de la dernière heure ?

Yves Beck, le visiteur du soir…

Il n’arrivait pas à cheval, il ne pouvait donc pas être Zorro. Ni Lucky Luke. Mais qui était-il donc ?
Au vu de l’agitation qui soudain s’était emparée de la salle de dégustation, il s’agissait forcément de quelqu’un de très connu dans le monde du vin ! Devant mes sourcils en forme d’accent circonflexe on me murmura à l’oreille : «Voilà Yves Beck… c’est le Parker européen et il arrive à l’instant de Suisse !»

Diable ! Voilà qui, en peu de mots, vous campe un personnage. Les choses prennent tout de suite un tour sérieux. Depuis que j’ai vu les citoyens de la patrie de mes ancêtres s’emparer de la coupe America à la voile alors qu’il n’ont même pas la mer chez eux, je me méfie. Les Hélvètes seraient bien capables de faire la révolution dans le monde du vin, maintenant que le vignoble en terrasses de Lavaux, sur les hauteurs du lac Léman entre Lausanne et Montreux est inscrit au Patrimoine Mondial par l’Unesco.

Je vérifie machinalement la charge de ma batterie. Je suis invité à graver ces instants précieux dans le marbre de ma carte SD, ce n’est pas le moment de se faire lâcher bêtement par le matériel. Ma première impression était la bonne. Ce Yves Beck est un personnage. Il est capable d’extérioriser une joie sincère et spontanée en retrouvant des gens qu’il connaît et de se plonger dix secondes plus tard dans une concentration de moine bouddhiste dès qu’il a le nez au-dessus du verre.

A propos de nez, le sien est étonnant. Non, pas par sa taille. Mais par sa capacité à sentir ce que le commun des mortels ne sent pas. Quelques crémants sont soumis à la question et génèrent me semble-t-il une certaine satisfaction. Puis le théâtre des opérations se déplace vers le stand des rieslings et pinots noirs. Le premier de ces rieslings est dans le verre et attend l’appréciation du maître. Mais quelque chose ne va pas…

Une odeur parasite perturbe le nez du dégustateur. Tous les yeux se lèvent pour scruter les alentours. Apparemment rien de suspect à proximité, pas de barbecue qui fume ou de plastique qui chauffe. Une salle calme et feutrée… Soudain notre visiteur se jette sur le coupable ! Un hydrangea Annabella avec ses belles boules blanches qui fait partie du sobre jardin japonais aménagé en milieu de salle, à deux mètres de là… Diable ! Je m’approche discrètement de la fleur. A 15 centimètres, je commence à sentir quelque chose. Lui, à deux mètres, il est déjà en mode alerte rouge ! On déplace le mange-debout pour mettre de la distance entre les deux antagonistes. Ca ne suffit pas. Là-bas il y a encore des dames qui portent des parfums… Quand je vous parlais de nez…

Comme l’explique très bien Francis Fischer, président du syndicat viticole de Ribeauvillé, les coteaux de Ribeauvillé sont très pentus. Certaines vignes s’accrochent à de vertigineux versants descendants…

… tandis que le vignoble voisin, comme le démontre Etienne Sipp, pourra escalader une pente montante très escarpée 🙂

Selon qu’ils se trouveront en haut ou en bas de la pente, dégustateurs et vignerons passionnés sont prêts à défendre leurs convictions de façon animée et parfois toute méditerranéenne !

Je suis bluffé aussi par la méthode de dégustation d’Yves Beck : après une longue analyse olfactive, le nectar qui est sur le gril, euh pardon, dans le verre… passe dans la bouche. Aspiration d’oxygène, mâche, lever de sourcils et là, tandis que le palais continue de malaxer et de s’imprégner longuement du vin, les doigts se mettent à courrir sur le clavier de l’ordinateur : les sensations passent directement de la bouche du dégustateur au disque dur ! Impressionnant !

Après quelques vins, Yves Beck, alias le redoutable Beckustator (c’est son nom de scène ou bien devrais-je dire son nom de cave ?) manifeste son impatience et sa frustration: «Arrête-donc de me présenter uniquement des bons vins, lance-t-il à Bernd Koppenhoefer qui fait office de sommelier bénévole. Apporte moi donc quelques mauvais flacons. Il faut bien que je puisse me construire des repères !» 🙂

Pendant que les vins subissent leur interrogatoire, défendus par le vigneron qui les a créés, moi, je déguste la scène. Ce n’est pas tous les jours qu’on est le témoin de la conduite à l’autel de ces fines et délicates fiancées blondes, filles de la vigne et du vigneron. Les parents se demandent toujours si le prétendant sera le prince charmant ou bien l’ogre. Il n’y a pas d’autre issue que de se faire confiance mutuellement.

Un pan du voile du mystère vient toutefois d’être levé.
Le résultat de cette dégustation mémorable publié par Yves Beck est à présent disponible sur son blog. Et l’Alsace, comme il l’écrit, est «tout là-haut!»

Merci à mes amis vignerons de Ribeauvillé (et des environs) et à mon nouvel ami le Beckustator pour ce moment privilégié d’une grande intensité. J’espère qu’il y en aura d’autres.

Pour suivre Yves Beck le Beckustator dans ses œuvres partout où il y a de grands vins, voici l’adresse de son blog et celle de sa page Facebook… Vous ferez de belles découvertes !

Et pour mémoire, mon article sur la Fête du Vin de Ribeauvillé comme si vous y étiez… est ici.

Votre hébergement au cœur du vignoble

Ribeauvillé est à 4 kilomètres seulement de nos appartements de vacances de Riquewihr aménagés dans les bâtiments historiques d’un ancien domaine viticole de 1580, face au vignoble grand cru du Schoenenbourg.
Les Remparts de Riquewihr
9 rue des Cordiers, 68340 Riquewihr – www.remparts-de-riquewihr.com